Activité lors du cours d'engagement citoyen.

L’importance de l’accompagnement pédagogique au sein d’une expérience de Service Learning

L’exemple d’engagement citoyen à l’Université de Namur

par Antoine Stasse
Chargé de projets en éducation à la citoyenneté mondiale et solidaire à la FUCID

Le 6 novembre 2019, la FUCID a donné rendez-vous à 42 étudiant·e·s de 3ème bac de la Faculté des sciences économiques, sociales et de gestion de l’UNamur. Il·elle·s ont en effet décidé de s’engager dans une toute nouvelle activité mêlant engagement concret auprès d’associations et réflexion sur eux-mêmes, leurs études et leur citoyenneté et se sont rassemblé·e·s pour la première fois dans ce contexte. Au programme, deux heures et demie d’échanges et de réflexions autour de l’identité – la leur et celle des autres –, de leurs motivations ou encore de leurs craintes par rapport à ce projet. Après une matinée riche en apprentissages, l’activité a été officiellement lancée.

C’est en effet durant l’année académique 2019-2020 que la première édition d’engagement citoyen fut organisée. Cette activité, construite par la Professeure Natalie Rigaux en collaboration avec les chargé·e·s de projets de la FUCID, propose aux participant·e·s de s’engager dans un projet associatif poursuivant des objectifs sociétaux – justice sociale, justice environnementale, etc. – ou au sein d’une entreprise intégrée dans l’économie sociale et solidaire, tout en en tirant un maximum d’apprentissages en vue de réfléchir sur son itinéraire personnel, académique et citoyen. Afin d’améliorer la qualité pédagogique du processus, un accompagnement fut mis en place sous forme de trois rencontres collectives, une rencontre individuelle et différents travaux à réaliser au cours de l’année.

Une activité inspirée par le Service Learning

Même si elle ne répond pas complètement à l’ensemble des critères définissant le Service Learning, l’activité d’engagement citoyen s’en inspire fortement.

Le Service Learning ou Apprentissage par le Service propose aux étudiant·e·s d’associer au sein d’une même unité d’enseignement l’apprentissage universitaire, un service rendu à la communauté et une réflexion critique sur leur expérience, eux-mêmes, leur cursus et la société.

En Belgique, la KULeuven est à la pointe en termes de réflexions et d’implémentation de cette pratique pédagogique. Elle le définit comme suit : « le Service Learning […] est une approche éducationnelle dans laquelle les concepts centraux sont “service”, “réflexion” et “apprentissage”. Les étudiant·e·s rendent service à la société en s’engageant dans une communauté spécifique. En même temps, il·elle·s construisent une réflexion critique et structurée sur leurs expériences. De cette manière, ils apprennent aux niveaux académique, civique et personnel. Le Service Learning considère les étudiant·e·s comme des “touts” qui n’acquièrent pas seulement des compétences académiques mais aussi sociales et personnelles. En outre, le Service Learning les aide à devenir des citoyens responsables et critiques »[1]Traduit depuis l’anglais. (KU Leuven). L’importance de la réciprocité est également à souligner. En effet, si les étudiant·e·s doivent tirer profit de l’expérience, il est également primordial de ne pas instrumentaliser les associations et de prendre en compte leurs besoins lors de la définition de l’engagement qui sera réalisé.

(Illustration : KU Leuven)

Le Service Learning se développe depuis plusieurs décennies en Amérique du Nord et du Sud et se diffuse à travers le monde depuis quelques années. Il est donc arrivé en Europe plus récemment et, bien que les choses évoluent, il est pour le moment assez peu présent dans le monde universitaire francophone européen. Mais, pour la KULeuven, « même si en Europe le Service Learning n’est expérimenté que depuis peu, on trouve un grand nombre de pratiques existantes qui ne portent pas le nom de Service Learning, mais qui contiennent tous ou une partie de ses éléments. » (Ibidem) Pour la FUCID, l’activité d’engagement citoyen se situe en effet dans cette catégorie de pratiques.

À travers cette activité d’apprentissage qui, comme nous l’avons mentionné, permet aux étudiant·e·s de participer à un projet associatif en vue de réfléchir à leur itinéraire personnel, académique et citoyen, et en s’appuyant sur un accompagnement pédagogique, la FUCID entend aussi contribuer à l’atteinte d’autres objectifs pédagogiques. Les activités proposées visent notamment à favoriser des rencontres interculturelles, à accompagner les étudiant·e·s vers un plus grand intérêt pour et une meilleure compréhension des enjeux et thématiques de la citoyenneté mondiale, à susciter chez eux des réflexions autour de questions liées à différentes inégalités, ainsi qu’à les encourager à développer une vision plus critique et systémique de la société.

Les activités proposées visent notamment à favoriser des rencontres interculturelles, à accompagner les étudiant·e·s vers un plus grand intérêt pour et une meilleure compréhension des enjeux et thématiques de la citoyenneté mondiale, à susciter chez eux des réflexions autour de questions liées à différentes inégalités, ainsi qu’à les encourager à développer une vision plus critique et systémique de la société.

Comme Natalie Rigaux l’a montré dans son analyse [2]N. Rigaux, « Susciter un engagement citoyen réfléchi à l’université : l’apport de la collaboration avec le monde associatif » : https://www.fucid.be/susciter-un-engagement-citoyen-reflechi-a-luniversite-lapport-de-la-collaboration-avec-le-monde-associatif/, les évaluations de ce projet nous ont permis de tirer des enseignements tant au niveau des apports de cette activité que des risques ou écueils à prendre en compte lors de sa mise en place. Les apports ayant été développés dans ce texte (citons par exemple la découverte par les étudiant·e·s du secteur associatif, une expérience d’engagement, ou encore l’entame d’une réflexion critique sur leur citoyenneté, leurs études et la société), nous partirons ici des risques identifiés afin de nous interroger sur la manière dont nous entendons les prendre en compte et les prévenir au maximum. Si des aménagements au sein des cursus sont mentionnés comme pistes par Natalie Rigaux, nous nous concentrerons sur ce qui est de notre ressort, sur ce que la FUCID peut proposer comme améliorations dès l’édition de cette année.

Des risques à considérer

En se basant notamment sur les évaluations des étudiant·e·s et des animat·eur·rice·s., Natalie Rigaux identifie trois risques et/ou écueils liés à l’activité d’engagement citoyen telle qu’elle fut mise en place lors de sa première édition : un renforcement chez certains participant·e·s de stéréotypes sur les populations bénéficiaires ou les thématiques traitées, une difficulté à comprendre et prendre en compte les causes structurelles des problématiques rencontrées et la difficulté de resituer le projet associatif dans le contexte de politiques publiques.

Parmi les associations choisies par les étudiant·e·s, une majorité travaillaient dans le domaine de la lutte contre la pauvreté. Il semble également que ce soit chez ces dernières que les écueils relevés se sont manifestés le plus.

Les évaluations ont montré que certain·e·s participant·e·s à l’activité d’engagement citoyen sont sorti·e·s de celle-ci en ayant davantage de stéréotypes concernant les populations et thématiques rencontrées qu’avant l’expérience. La présence de ce risque ainsi que son intensité ont été influencées à la fois par la fréquence et la qualité des échanges avec les travailleur·euse·s et les bénéficiaires de l’association – alors que chez certain·e·s ces discussions ont permis une réelle prise de recul, d’autres ont vu leurs stéréotypes se renforcer suite à des interactions avec des bénévoles ou des bénéficiaires.

Les évaluations ont montré que certain·e·s participant·e·s à l’activité d’engagement citoyen sont sorti·e·s de celle-ci en ayant davantage de stéréotypes concernant les populations et thématiques rencontrées qu’avant l’expérience. La présence de ce risque ainsi que son intensité ont été influencées à la fois par la fréquence et la qualité des échanges avec les travailleur·euse·s et les bénéficiaires de l’association – alors que chez certain·e·s ces discussions ont permis une réelle prise de recul, d’autres ont vu leurs stéréotypes se renforcer suite à des interactions avec des bénévoles ou des bénéficiaires. Par exemple, les récits de certain·e·s étudiant·e·s s’étant engagé·e·s dans des associations luttant contre la précarité ont fait ressortir des stéréotypes concernant les personnes défavorisées. Ces dernières y étant parfois décrites comme « sans reconnaissance à l’égard de “tout ce que les bénévoles font pour eux”, ne voulant pas “s’en sortir”, pas contents de ce qu’on leur donne,… » (Rigaux, 2020). De la même manière, les discussions entre étudiant·e·s ont eu des impacts très différents selon les cas, allant d’un renforcement des clichés à une aide à la réflexion et une remise en question de ces clichés.

Le deuxième risque décrit par Natalie Rigaux concerne le manque de prise en compte des causes structurelles de la pauvreté pour les étudiant·e·s concerné·e·s par la thématique, « chez lesquel·le·s est souvent utilisé le terme de “chance” pour évoquer leur propre position ».

Enfin, et bien que cela leur avait été demandé, les participant·e·s ont éprouvé de grandes difficultés à replacer le projet de leur association dans le contexte plus large de politiques publiques, « comme si happé·e·s par le lieu de l’engagement, il·elle·es ne parvenaient plus à en discuter le projet, sa pertinence et sa portée dans un contexte plus large (ex. : distribuer des colis considéré comme une façon de lutter contre la pauvreté et non comme un palliatif) » (Ibidem).

L’importance du processus pédagogique

Conscient·e·s de ces risques et persuadé·e·s qu’un processus pédagogique de qualité pouvait minimiser ces derniers, nous avons réfléchi à l’amélioration du dispositif mis en place lors de cette première expérience de l’activité d’engagement citoyen. L’idée est d’outiller les étudiants et étudiantes en prenant en compte chacun des écueils identifiés.

Pour travailler les questions liées aux stéréotypes et à la rencontre interculturelle [3]La rencontre interculturelle doit être comprise ici de manière large, comme rencontre avec des personnes issues de contextes culturels différents, que ces différences soient liées à leur origine, leur milieu social, leur mode de vie, etc. que les étudiant·e·s sont amené·e·s à vivre durant leur engagement, nous avons pris le pli de partir d’une réflexion autour de leur identité propre. Nous pensons en effet qu’il est primordial de se connaître au mieux afin de comprendre l’autre avec qui nous allons interagir. Via l’adaptation d’un outil pédagogique appelé l’oignon de l’identité [4]Pour une description précise de l’outil initial – parfois également appelé « molécule de l’identité » - rendez-vous à l’adresse suivante : https://www.youmanity.org/la-molecule-didentite-un-outil-daction-interculturelle/, nous les aidons à prendre du recul par rapport à la manière dont il·elle·s se définissent et à conscientiser les caractères à la fois composite, dynamique et dialectique [5]Nous appartenons à différents ensembles culturels qui ont chacun de l’influence sur notre identité (notre identité est composite). Loin d’être figée, notre identité évolue constamment (notre identité est dynamique). Notre identité se modifie dans la rencontre et les interactions avec … Continuer de lire de leur identité. Ces réflexions permettent l’amélioration de la compréhension de soi et les amènent à complexifier la notion d’identité. Une deuxième phase de l’exercice consiste à travailler autour de l’identité de l’autre telle qu’il·elle·s la perçoivent mais aussi sur la manière dont il·elle·s sont perçu·e·s par l’autre. La réintroduction de la complexité au sein des identités, mais aussi dans les liens entre ces dernières et les perceptions que nous en avons, permet de mieux comprendre l’autre et les éventuels « chocs culturels » [6]« Le choc culturel est une situation conflictuelle qui se produit entre deux individus culturellement différents placées en interaction dans une situation sociale ». Iteco, http://www.iteco.be/ressources/concepts-grilles-d-analyse-exercices-et-jeux-dont-le-jeu-des-chaises/Le-choc-culturel,44 qui pourraient survenir lors de la rencontre.

Lors de leur expérience d’engagement, certain·e·s étudiant·e·s n’ont pas reçu l’accompagnement nécessaire sur place pour comprendre les enjeux liés aux problématiques traitées par leur association et aux publics de celle-ci. Cela a également pu renforcer certains stéréotypes et nous pensons donc qu’une préparation plus thématique serait utile pour combler ce manque connaissances et de compréhension. Dans ce contexte, les rencontres individuelles proposées aux étudiant·e·s par Natalie Rigaux sont également une aide à la prise de recul.

Selon nous, ce travail thématique serait aussi utile dans la prévention du deuxième risque lié à la prise en compte des causes structurelles des situations rencontrées sur leur lieu d’engagement – de la pauvreté, par exemple.

Enfin, nous avons mis en place un module permettant aux étudiant·e·s de réfléchir à la pertinence et à l’efficacité des différents modes d’action de l’associatif en fonction des problématiques traitées tout en replaçant ces actions dans le contexte des politiques publiques déployées. L’exercice proposé aux étudiant·e·s se base sur une grille d’analyse [7]Grille d’analyse expliquée et développée par Damien Charles de l’ONG Quinoa dans l’analyse FUCID « Quelles stratégies pour l’action collective ? » (https://www.fucid.be/wp-content/uploads/2018/10/analyse-reflexion-2018.pdf) et adaptée en 2020 par Natalie Rigaux dans le cadre de … Continuer de lire identifiant trois modes d’action collective par rapport aux institutions étatiques qui sont en fait trois idéaltypes [8]« L’idéaltype est une notion sociologique construite par Max Weber. Qualifier un concept d’idéaltype, c’est reconnaître qu’il n’existe pas réellement de manière pure et que la réalité est plus complexe que ce qui peut renvoyer le concept théorique concerné. Cependant, recourir … Continuer de lire : « avec, sans et contre ». Via cet outil, nous souhaitons aider les étudiant·e·s à percevoir et comprendre les différentes stratégies d’action utilisées par les acteur·rice·s du secteur associatif dans lesquels il·elle·s sont engagé·e·s ainsi qu’à leur appliquer la grille. Afin d’affiner l’analyse et de prévenir davantage le risque identifié, Natalie Rigaux a proposé d’adapter légèrement la grille et de commencer par interroger les participant·e·s sur les objectifs de changement des différentes associations.

Avant de s’intéresser à la manière dont elles souhaitent changer les choses, il est intéressant de se questionner sur l’existence de cette volonté de changement. Les projets dans lesquels les étudiant·e·s sont engagé·e·s essayent-t-ils de faire en sorte que la société fonctionne le mieux possible au sein du cadre en place ou visent-t-ils un changement en profondeur du fonctionnement de la société et des politiques publiques ?

Avant de s’intéresser à la manière dont elles souhaitent changer les choses, il est intéressant de se questionner sur l’existence de cette volonté de changement. Les projets dans lesquels les étudiant·e·s sont engagé·e·s essayent-t-ils de faire en sorte que la société fonctionne le mieux possible au sein du cadre en place ou visent-t-ils un changement en profondeur du fonctionnement de la société et des politiques publiques ?

En fonction de la réponse, différentes stratégies pourront alors être identifiées. Si une structure entend améliorer les choses sans viser de changement politique profond, elle peut le faire pour – il peut s’agir directement d’émanations de l’État, comme les CPAS, mais aussi d’associations agissant dans le cadre de politiques publiques, comme les centres d’accueil pour réfugiés de la Croix-Rouge – ou sans les institutions étatiques. Elles pallient alors un manque des autorités, par exemple en hébergeant et/ou nourrissant des personnes en situation de grande pauvreté.

Si, au contraire, l’objectif est de remettre en question les politiques publiques en place et de faire bouger les lignes, la grille de lecture identifie trois autres stratégies. En travaillant avec l’État, certaines associations entendent le pousser à changer les politiques publiques via la concertation démocratique – via le dialogue, la négociation ou encore le plaidoyer. D’autres préfèrent agir sans les institutions, en autonomie par rapport à elles, en inventant des alternatives aux problèmes contre lesquels elles se dressent et en montrant que d’autres façons de fonctionner existent et peuvent être inventées. Enfin, certaines actions se construisent contre l’État. Les décideur·euse·s sont vu·e·s comme obstacles au changement et l’objectif est de modifier le rapport de force via le conflit, voire de contester la légitimité des institutions. Les moyens utilisés seront alors de l’ordre de la protestation, de la résistance ou de la désobéissance.

L’utilisation de cette méthode d’analyse des actions sociales doit permettre aux étudiant·e·s de prendre du recul par rapport au projet dans lequel il·elle·s sont engagé·e·s, de le replacer dans un contexte plus large, d’y réfléchir de manière critique et de se positionner en tant que citoyen·ne par rapport aux différents modes d’action.

La troisième rencontre prévue dans le cadre d’engagement citoyen est organisée sous forme d’échanges en sous-groupes entre les étudiant·e·s, des membres de la Faculté d’économie et des acteurs et actrices de terrain venant de différentes associations. Cette étape permet aux étudiant·e·s de formuler leurs réflexions en cours, mais également d’avoir un retour réflexif sur leur expérience. Alors que les membres de la faculté alimentent les discussions concernant le cursus, les représentant·e·s de la société civile facilitent la réflexion autour des questions sociétales et d’engagement. Cette étape apporte une réelle plus-value au processus et permet de minimiser encore davantage, via les différents échanges, les risques identifiés suite à la première expérience.

D’autres écueils à éviter

En dehors des risques relevés lors de nos réflexions autour de l’activité d’engagement citoyen – pour rappel, le développement ou renforcement de stéréotypes, le manque de réflexion autour des causes structurelles, des difficultés à comprendre et prendre en compte les causes structurelles des problématiques rencontrées et la difficulté de resituer le projet associatif dans le contexte de politiques publiques – , nous trouvons dans la littérature d’autres écueils à éviter et qu’il conviendra selon nous d’avoir à l’esprit lors de la mise en place de nouvelles activités. Parmi ceux-ci, nous pouvons mentionner le risque déjà évoqué d’instrumentalisation des lieux d’engagement. Pour le chercheur John Eby, « le service peut être subverti et devenir un “moyen en vue d’une fin” plus qu’une fin en soi. » Selon lui, « souvent, le Service Learning est organisé pour répondre aux besoins d’une institution académique, des étudiant·e·s, d’un·e enseignant·e ou d’un cours. Les besoins des associations et de la communauté viennent souvent en dernier. » (1998, p.2) [9]Traduit de l’anglais. Afin d’éviter cet écueil, il est donc important de prendre en compte les intérêts de l’ensemble des parties prenantes dès l’entame de l’activité.

Selon Tania Mitchell, le Service Learning a parfois également été « qualifié de “volontariat forcé”, critiqué pour renforcer les hiérarchies établies et jugé paternaliste. » (2008, p.51) [10]Traduit de l’anglais. Une réflexion sur la notion d’aide et d’engagement peut ici être d’une grande utilité.

Enfin, pour ce même professeur, spécialiste du développement étudiant, si l’on veut susciter chez les étudiant·e·s davantage que des bons sentiments, il est nécessaire de travailler sur la prise de conscience et la compréhension des causes profondes des problèmes sociaux rencontrés. Sans cela, le Service Learning peut selon elle « engager les étudiant·e·s dans la communauté d’une manière qui perpétue les inégalités et renforce la dichotomie “eux-nous”. » (Ibidem)

Quelle implication pour la FUCID dans les projets de Service Learning ?

Après une première expérience plus qu’encourageante, et en tenant compte des écueils potentiels que nous venons de mentionner, nous poursuivons notre réflexion afin d’améliorer l’activité d’engagement citoyen et d’en développer au maximum le potentiel. Nous venons de montrer comment, via des adaptations du processus pédagogique, nous entendions minimiser les risques identifiés et continuerons à faire évoluer ce concept afin qu’il colle au mieux aux besoins des étudiant·e·s ainsi qu’à nos objectifs pédagogiques.

Si Natalie Rigaux met en avant les points forts de sa collaboration avec la FUCID – se situant essentiellement dans la construction, l’organisation, et l’animation du processus d’accompagnement pédagogique –, faisant de nous, association d’éducation permanente et d’éducation à la citoyenneté mondiale et solidaire, un réel partenaire de formation dans cette activité, certaines questions stratégiques liées à ce type de projets ainsi qu’à leur probable multiplication se posent pour notre association. En effet, alors que la FUCID a également été impliquée dans la création et le lancement, l’année passée, d’une activité similaire au sein du département de géographie de l’UNamur, et que nous sommes en train d’en co-créer une autre au sein d’un cours d’anthropologie, l’Université de Namur est depuis peu impliquée dans un programme international d’accompagnement et de promotion du Service Learning [11]Uniservitate est un programme international de promotion du Service Learning dans l’enseignement supérieur catholique, https://www.uniservitate.org/. Cela devrait avoir pour conséquence d’y voir naître, dans un avenir relativement proche, d’autres expériences inspirées du Service Learning. À terme, les opportunités d’implication de la FUCID dans de nouveaux projets au sein de différents cursus devraient donc augmenter. Mais cette augmentation des possibilités et la prise en compte des écueils à éviter doivent aussi nous pousser à clarifier la position que nous souhaitons prendre à l’avenir : Quelle place la FUCID souhaite-t-elle prendre dans toutes ces initiatives ? Quel rôle exact entend-elle jouer et jusqu’où est-il pertinent qu’elle aille dans la co-création et l’accompagnement de ces activités ? Étant donné l’importance de l’accompagnement pédagogique dans le processus, combien de projets différents est-il possible et/ou souhaitable de suivre ? Autant de questions qui guideront nos réflexions futures et qui pourraient également, au regard du très probable développement de nouvelles initiatives de Service Learning dans bon nombre d’établissements d’enseignement supérieur de Belgique francophone, alimenter celles d’autres associations similaires à la nôtre.

Références

Références
1 Traduit depuis l’anglais.
2 N. Rigaux, « Susciter un engagement citoyen réfléchi à l’université : l’apport de la collaboration avec le monde associatif » : https://www.fucid.be/susciter-un-engagement-citoyen-reflechi-a-luniversite-lapport-de-la-collaboration-avec-le-monde-associatif/
3 La rencontre interculturelle doit être comprise ici de manière large, comme rencontre avec des personnes issues de contextes culturels différents, que ces différences soient liées à leur origine, leur milieu social, leur mode de vie, etc.
4 Pour une description précise de l’outil initial – parfois également appelé « molécule de l’identité » - rendez-vous à l’adresse suivante : https://www.youmanity.org/la-molecule-didentite-un-outil-daction-interculturelle/
5 Nous appartenons à différents ensembles culturels qui ont chacun de l’influence sur notre identité (notre identité est composite). Loin d’être figée, notre identité évolue constamment (notre identité est dynamique). Notre identité se modifie dans la rencontre et les interactions avec l’Autre (notre identité est dialectique).
6 « Le choc culturel est une situation conflictuelle qui se produit entre deux individus culturellement différents placées en interaction dans une situation sociale ». Iteco, http://www.iteco.be/ressources/concepts-grilles-d-analyse-exercices-et-jeux-dont-le-jeu-des-chaises/Le-choc-culturel,44
7 Grille d’analyse expliquée et développée par Damien Charles de l’ONG Quinoa dans l’analyse FUCID « Quelles stratégies pour l’action collective ? » (https://www.fucid.be/wp-content/uploads/2018/10/analyse-reflexion-2018.pdf) et adaptée en 2020 par Natalie Rigaux dans le cadre de l’activité d’apprentissage « Engagement citoyen ».
8 « L’idéaltype est une notion sociologique construite par Max Weber. Qualifier un concept d’idéaltype, c’est reconnaître qu’il n’existe pas réellement de manière pure et que la réalité est plus complexe que ce qui peut renvoyer le concept théorique concerné. Cependant, recourir aux idéaltypes permet de formuler des hypothèses afin de mieux appréhender cette complexité ». (Charles, 2018)
9, 10 Traduit de l’anglais.
11 Uniservitate est un programme international de promotion du Service Learning dans l’enseignement supérieur catholique, https://www.uniservitate.org/

Bibliographie

L'analyse en PDF

 L'analyse est disponible en format PDF téléchargeable en cliquant ici.